Proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie

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D.R.

L’essentiel de la proposition de loi

Le réchauffement climatique accroit d’année en année le risque de « mégafeux ». D’ici 2050, les surfaces brûlées pourraient augmenter de 80% dans la seule zone méditerranéenne. Un rapport sénatorial remis à l’été 2022 a préconisé plusieurs dispositifs pour mieux prévenir et lutter contre ces incendies. La proposition de loi, présentée par les mêmes auteurs que ce rapport, traduit plusieurs de ces recommandations.

Telle qu’adoptée et enrichie par les parlementaires et le gouvernement, elle traite de huit thématiques dans des titres dédiés :

  • Élaborer d’ici 2024 une stratégie nationale de défense des forêts et des surfaces non boisées contre les incendies. Cette stratégie relèvera des ministères chargés de la forêt, de l’environnement et de la sécurité civile, en concertation avec divers acteurs comme l’Office national des forêts (ONF) ou les élus des communes forestières. Elle devra dresser un état des lieux des moyens humains, financiers et technologiques disponibles et mobilisables sur l’ensemble du territoire pour prévenir et lutter contre l’intensification et l’extension du risque incendie. Cet état des lieux sera décliné par région.
  • Mieux réguler les interfaces forêts-zones urbaines- infracstructures
    Une procédure simplifiée est instituée pour définir, à l’échelle des communes, des zones de dangers où s’appliqueront des règles spécifiques d’occupation et de constructibilité des sols, inspirées de celles qui sont mises en oeuvre dans les plans de prévention des risques naturels d’incendies de forêt (PPRif).
  • Dynamiser la gestion des forêts et promouvoir la sylviculture face au risque incendie
    Un réseau national de référents compétents en matière de défense des forêts contre les incendies est institué au sein du Centre national de la propriété forestière.
  • Améliorer l’aménagement des massifs forestiers
  • Mobiliser le monde agricole pour consacrer leur rôle majeur dans la prévention des feux de forêt
    Les préfets devront notamment établir une liste des acteurs pouvant être mobilisés en soutien de la lutte contre l’incendie, qui inclura les agriculteurs disponibles et volontaires dans chaque commune ainsi que leurs citernes d’eau. Les agriculteurs pourront être réquisitionnés pour l’approvisionnement en eau.
  • Sensibiliser les populations
  • Équiper les sapeurs-pompiers à la hauteur des besoins
  • Reboiser les parcelles brûlées et financer la reconstitution de forêts plus résilientes.

Parmi les mesures phares du texte figurent plusieurs articles qui renforcent les obligations légales de débroussaillement (OLD), qui sont une mesure essentielle de prévention. Les conditions de mise en œuvre des OLD dans les campings sont clarifiées. Les sanctions pénales en cas de non respect de ces obligations sont aggravées, passant de 30 à 50 euros par mètre carré non débroussaillé. Les députés ont encore étendu les OLD. En particulier, un amendement crée une obligation de débroussaillement aux abords des sites Seveso situés à moins 200 mètres des bois et forêts, sur une profondeur de 100 mètres. Les députés ont supprimé le crédit d’impôt pour dépenses de travaux de débroussaillement, institué par les sénateurs.

Un autre article de la proposition de loi consacre au niveau de la loi l’interdiction de fumer jusqu’à une distance de 200 mètres dans l’ensemble de bois et forêts pendant la période à risque d’incendie définie par arrêté préfectoral. Cette interdiction a été élargie par les députés. Initialement, le Sénat ne l’avait prévue que dans les bois et forêts classés à risque. Un amendement sénatorial a inclus explicitement le jet de mégot parmi les causes pouvant « provoquer involontairement l’incendie des bois et forêts ». Comme c’est déjà le cas dans d’autres circonstances (feux allumés ou laissés sans précautions suffisantes…), le responsable pourra encourir, pour les cas les plus graves ayant conduit à la mort d’une ou de plusieurs personnes, dix ans de prison et 150 000 euros d’amende.

Par amendement du gouvernement, la journée nationale de la résilience (JNR), qui s’est tenue pour la première fois le 13 octobre 2022, est pérennisée afin « d’assurer la préparation de la population face aux risques naturels ou technologiques ». La JNR sera organisée chaque année le 13 octobre. De plus, pour renforcer son efficacité, un autre amendement gouvernemental a inscrit expressément les risques majeurs dans la sensibilisation des personnels, tant pour les employeurs publics et privés que pou les responsables d’établissement.

Pour mieux lutter contre les incendies, les employeurs privés qui facilitent la disponibilité de leurs salariés sapeurs-pompiers volontaires pour des missions opérationnelles, bénéficieront d’un réduction de cotisations patronales (jusqu’à un montant de 1 500 € par salarié et 7 500 € par employeur). La réduction sera applicable pour une durée de 2 ans et donnera lieu à une évaluation finale permettant d’en vérifier l’intérêt et le coût. Les députés ont, de leur côté, instauré une autorisation légale d’absence de cinq ou huit jours par an pour les sapeurs-pompiers volontaires en cas de crise, à l’instar de celle qui existe déjà dans la réserve opérationnelle. Cette mesure s’appliquera aux employeurs privés comme publics. Les étudiant sapeurs-pompiers volontaires bénéficieront également d’aménagements dans l’organisation et le déroulement de leurs études et de droits spécifiques.

Contre l’avis du gouvernement, les députés ont voté en faveur d’une exonération totale de la taxe sur les carburants pour les véhicules des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), comme le prévoyait le texte initial. Les sénateurs avaient voté pour une exonération partielle.

En outre, un amendement sénatorial a donné une assise juridique dans le code forestier à la pratique des coupes tactiques des arbres, qui ont été effectuées en urgence à l’été 2022 pour freiner les vastes feux qui ont frappé la Gironde et les Landes.

Députés et sénateurs doivent désormais se réunir en commission mixte paritaire pour trouver un accord sur une version finale de la proposition de loi.